La Norvège, 2007 – Réflexions

Une expérience extraordinaire et très formatrice. Un tel voyage ne s'improvise pas. Il demande de longues heures de préparation. Il faut avoir anticipé au mieux les éventuelles difficultés, avoir réuni et étudié la documentation.

Le vol à plusieurs avions
En voyage, c'est sympa de partir à plusieurs avions, surtout avec un leader comme Michel Blanc. Mais même si à chaque étape tous les avions partent à peu près au même moment vers une destination commune, même si les navigations ont été préparées en commun, chaque équipage reste autonome et responsable de son vol. Ce n'est pas un vol en formation, les vitesses des avions sont différentes (ici un DR160, un DR180, plus rapide, et un Cirrus encore plus rapide), et chacun gère au mieux son propre vol, fait ses propres choix, surtout par mauvaises conditions qui, en plus ici, évoluaient souvent vite – et rarement dans le bon sens…

La météo
Il est évident que la météo de la Scandinavie se prête assez mal au voyage en VFR. Il faut en permanence rester sur ses gardes, louvoyer, s'adapter. Même comme cela, il y a eu pas mal de VFR spécial. Bien qu'on ait fait ce voyage début juillet, la météo a été particulièrement instable. Cela nous a obligé très vite à modifier totalement l'itinéraire initialement prévu en Scandinavie, et à faire de nombreux changements et déroutements : un voyage dans ces zones demande une certaine faculté d'adaptation, et surtout de ne pas avoir l'obsession du but préfixé.

La longueur des étapes
Pour aller loin dans un temps raisonnable, les étapes sont souvent longues, et une journée comprend en général deux, voire trois étapes. La "pause" de midi, rarement à midi, se passe surtout en avitaillement, en étude du dossier météo, en dépôt de plan de vol, et autres formalités diverses. Pour les accompagnants, l'impression de passer vraiment beaucoup de temps dans les aéroports, d'où la nécessité de s’arrêter parfois au moins 2 nuits quelque part. A titre d'exemple, notre première demi-journée, du Versoud à Charleville (à la frontière belge) faisait 290 nautiques (près de 3h de vol). Plusieurs branches ont dépassé 300 nautiques, 3h15 de vol pour la plus longue (Orebro – Vaasa, 350 nautiques). La journée la plus longue, de Trondheim à Lubeck, en 3 étapes faisait 710 nautiques (en comparaison, un trajet direct Le Versoud - Brest représente 470 nautiques).

La longueur du jour
Début juillet, au Nord du cercle arctique, 24h de jour ! Ça laisse de la marge… Une seule fois, au Danemark, encore loin de la zone arctique, lors d'un déroutement après une longue halte pour panne, nous sommes arrivés à la limite (un peu dépassée ?) de la nuit aéronautique. Dans ce cas, la qualif de nuit est utile pour rester dans les clous administratifs.

L'autonomie des avions
Les DR400 ont à peu près 4h30 d'autonomie, environ 450 nautiques. Le point de non-retour du trajet direct est presque toujours dépassé. Il faut bien garder en tête les possibilités de déroutement non seulement météo mais aussi pour avitaillement. En Suède et en Norvège, où l'avion est souvent le meilleur moyen d'accès aux zones isolées, les terrains sont nombreux le long de la côte, souvent assez courts (8 à 900m) mais toujours bien balisés. Penser aussi à partir avec un avion dont le potentiel est suffisant. Notre périple a représenté au total environ 40h de vol.

La navigation
Hors de France, tous les vols se font sous plan de vol. C'est une contrainte. Il faut du temps pour les remplir, les points de report demandés sont parfois des points IFR difficiles à trouver. Mais c'est aussi un vrai confort que de se savoir suivi par le contrôle, qui est là avant tout pour nous aider (on ne le dit pas assez souvent). L'utilisation des tablettes simplifie beaucoup la navigation, mais j'avoue que je préfère de beaucoup suivre mon trajet sur une carte papier, en allant de point de report en point de report. Tout le long du voyage, nous avons eu de très bonnes cartes (même si les cartes norvégiennes, de vrais draps de lit, demandent un pliage bien réfléchi), et le relief est suffisamment varié et découpé pour se localiser facilement, sauf dans les étendues monotones de Laponie. Quoi qu'il en soit, la carte papier est hélas en train de disparaître (par exemple chez Jeppesen, dont les cartes étaient très utilisées). Dommage pour les jeunes générations ! Mais quand même, lors de vols par mauvaise visibilité - il y en a eu beaucoup dans ce voyage où le beau temps a plutôt été l'exception –ou pour les vols "on top", le GPS reste une aide vraiment rassurante.

La radio
Elle se fait systématiquement en anglais, mais les contrôleurs sont assez habitués au mauvais anglais des Frenchies et parlent alors plus lentement ! Il ne faut pas hésiter à utiliser le "say again, please", parfois précédé de "radio was jammed" pour préserver son amour-propre. La radio de secours, c'est vraiment du dépannage, ne pas compter dessus pour remplacer la radio du bord pendant toute une nav, la portée et la qualité sont vraiment trop faibles ! Le Pilote Automatique : seul le Cirrus en était équipé. Une aide précieuse, particulièrement en survol maritime par mauvaise visibilité.

Textes et légendes : Arnaud Pêcher
Photos : Agnès Pêcher, Michel Blanc